À partir du XVIe siècle, une industrie rurale se met en place sur le territoire breton. Si le lin et le chanvre sont cultivés partout, les activités de production et de transformation des toiles qui sont exportées se concentrent dans certains territoires selon leurs caractéristiques géographiques, géologiques et démographiques. La "manufacture" des toiles associe les terres fertiles du littoral, les terres plus pauvres de l’intérieur, les villes, les ports et leurs arrières-pays.
Du littoral vers le centre de la région la proportion des cultures de lin et de chanvre s'inverse. Les terres limoneuses du nord de la Bretagne, soumises au climat océanique, sont propices à la culture du lin, tandis que le chanvre est cultivé à l'intérieur du pays.
À travers toute la Bretagne, entre la culture et la commercialisation, les opérations multiples que représentent le semis, l'arrachage, l’égrenage, le rouissage, le teillage, le peignage, le filage, le blanchiment et le tissage font appel à des savoir-faire spécifiques et sont organisés de manière différente selon les régions.
Après avoir été cultivé sur la côte nord du Léon, le lin qui sert à la fabrication des crées est transformé dans l’arrière-pays léonard, du pays de Morlaix aux communes des marches des Monts d’Arrée en passant par le pays de Landerneau-Daoulas. Le lin cultivé dans le Trégor est, quant à lui, transporté dans les pays de Quintin ou Uzel pour subir les opérations qui permettent d’en faire les toiles appelées bretagnes. Sur le territoire des crées, les fils de lin sont blanchis avant d’être tissés alors que les bretagnes sont blanchies une fois tissées.
Les olonnes de Locronan, exportées via le port de Pouldavid, sont réalisées à partir du chanvre cultivé et transformé autour de la cité de tisserands et jusque dans le Cap Sizun. Le chanvre cultivé dans les pays de Noyal-sur-Vilaine et Vitré est transformé sur place pour donner respectivement les toiles noyales ou canevas. Dans le pays de Quimper, le chanvre est roui dans des douets ou routoirs alimentés par de nombreux ruisseaux alors que cette étape est souvent effectuée dans les eaux croupies des fossés dans le pays de Rennes, par manque de sources. Cela incite les paysans à désobéir à l'interdiction de procéder au rouissage dans les rivières.
Ces tâches sont réalisées sur un espace rural dispersé par des familles paysannes pour lesquelles ces activités représentent un complément de revenu.